[Analyse] Pourquoi les systèmes éducatifs n’arrivent-ils pas à mettre à profit les enseignements de la recherche?

 

Pourquoi les systèmes éducatifs n’arrivent-ils pas à mettre à profit les enseignements de la recherche?

Par Anne Coffinier, directrice générale de la Fondation pour l’école

Les systèmes scolaires n’arrivent pas à évoluer assez rapidement au regard des nouveaux besoins et défis éducatifs. Nos méthodes éducatives et nos structures éducatives publiques sont presque identiques à celles qui prévalaient il y a 150 ans. C’est particulièrement vrai en France.

N’est-il pas étonnant, note Olivier Roland, qu’on apprenne pas ou si peu à apprendre, alors que c’est la compétence la plus indispensable qui soit ?

En disant cela, il ne prend pas position dans la querelle des anciens et modernes, qui oppose ceux qui considèrent que l’école est là pour transmettre des connaissances fondamentales, à ceux qui estiment que l’école a plutôt vocation à apprendre à apprendre.

Nous constatons juste que le professeur intime tous les jours à ses élèves l’ordre d’apprendre telle leçon sans lui donner en général les indications méthodologiques suffisantes pour qu’il parvienne effectivement à le faire, s’il ne sait pas le faire d’instinct.

Olivier Roland s’étonne aussi du fait que nos systèmes éducatifs ne parviennent pas à prendre en compte les résultats de la recherche sur les méthodes d’apprentissage efficaces.

Il donne ainsi l’exemple de la méthode de la répétition espacée qui, bien que plébiscitée par la science et la pratique en matière de mémorisation, n’a jamais été appliquée en France ni enseignée dans les IUFM puis les ESPE.

Autre exemple, alors que notre temps exige de presque tous nos concitoyens qu’ils parlent au moins une langue étrangère très correctement pour ne pas être handicapés dans la vie professionnelle comme dans la vie courante, notre système éducatif n’a pas pris les mesures susceptibles d’atteindre cet objectif.

Olivier Roland note aussi que notre système scolaire ne s’est donné pour but ni de développer  la créativité, ni l’aptitude et le goût d’apprendre et de se former tout au long de leur vie chez les futurs adultes.

Là encore, son propos n’est pas de dire que l’école n’a pas pour vocation de transmettre les trésors de notre culture générale et de la civilisation occidentale. Son idée est simplement d’indiquer que l’école échoue si elle n’arrive pas à inculquer à ses élèves le goût insatiable de l’étude, le goût de la recherche de la vérité et de l’engagement actif dans ses études et, ajouterions-nous volontiers, dans la vie de l’esprit.

Dans la culture juive, on insiste beaucoup sur la nécessité d’étudier quotidiennement le Talmud et ses commentaires, quels que soient son métier et sa condition. Dans la culture maçonne, avec la philosophie de la perfectibilité, on retrouve aussi cet appel impérieux à l’effort intellectuel jusqu’à la mort. Le pape Benoît XVI, dans sa conférence aux Bernardins sur le “quaerere Deum”, avait manifesté également cette nécessité de l’étude qui permet d’accéder progressivement à la Vérité, visage de Dieu. Mais, dans la philosophie véhiculée par notre système scolaire français, on ne trouve pas assez cette invitation au perfectionnement permanent, tout au long de la vie, ni à l’engagement actif  de la pensée et l’étude dans la vie quotidienne.

Olivier Roland souligne qu’il est vain d’attendre que le système éducatif se réforme. Il est plus efficace de réagir personnellement, en changer nous-mêmes nos manières d’étudier etc.. à notre échelle de professeur, élève, parent…

La révolution éducative à effectuer est d’abord personnelle avant d’être structurelle, ne serait-ce qu’en raison de la pesanteur des réformes systémiques. On ne peut attendre 15 ans avant de recevoir et se donner (!) une éducation adéquate. C’est maintenant qu’il faut agir, qu’il faut innover et se prendre en main. Les écoles indépendantes sont un des lieux pertinents pour un tel réveil éducatif. A elles de savoir allier au mieux tradition et modernité pour relever les défis contemporains.