“Ancienne élève de l’Ena et de l’École normale supérieure, Anne Coffinier est directrice générale de la Fondation pour l’école, dont la vocation est d’aider à la constitution d’écoles indépendantes.
“Il ne sert à rien d’avoir un bon ministre car le ministère ne lui obéit plus. Tout le problème est là. Pour être crédible, le plan de sauvetage de l’école doit prendre en compte ce fait ; car la difficulté ne réside pas dans l’identification des solutions à la crise de l’institution scolaire – je m’accorde sans problème avec un Brighelli ou une Polony sur la nécessité de fixer des programmes exigeants faisant la part belle aux humanités classiques, de supprimer le collège unique, etc. – mais dans l’incapacité à faire entrer en vigueur quelque réforme scolaire que ce soit. Bien sûr, moi aussi, je regrette le temps où riches et pauvres, croyants et incroyants pouvaient s’asseoir sur le même banc d’école, car tous respectaient le savoir et reconnaissaient la légitimité du maître. Cette école élevait le niveau général des Français tout en dégageant une élite parla méritocratie. Mais l’école d’aujourd’hui n’a plus rien en commun avec l’école publique de nos souvenirs. Si cette nostalgie peut être une source d’inspiration poétique, elle ne constitue en rien une solution politique crédible au problème de l’école aujourd’hui.
“Le plan de sauvetage de l’école doit se fonder sur la réalité : le cadre bureaucratique et idéologisé de l’Éducation nationale est devenu un fardeau pour les professeurs alors que l’infrastructure administrative devrait plutôt être légère et mise au service des enseignants, pour le bien des élèves.
“Refondons notre système scolaire sur des établissements à taille humaine et autonomes dans leur gestion : les professeurs choisiront librement leur établissement et leurs méthodes mais seront tenus comptables des résultats de leurs élèves. Donnons à chaque enfant les moyens d’accéder à l’école de son choix grâce à la création d’un pass éducation : une somme allouée par l’État à toute famille qui le désire pour scolariser ses enfants dans une école privée indépendante, si c’est son choix. Ce sera source de qualité, d’économie – car l’école privée est bien moins coûteuse car mieux gérée – et de justice – car ce sont les plus démunis que l’on sacrifie aujourd’hui. Soyons attentifs à ce qui se fait outre-Manche où le gouvernement a misé sur les free schools pour augmenter le niveau et la justice de son système éducatif : ce sont des écoles libres de leur pédagogie, fondées à l’initiative de la société civile, et financées par l’État dès lors que leur projet a été agréé. Les écoles indépendantes à la française, communautés éducatives ouvertes se développant dans un cadre transparent et régulé par l’État, constituent notre meilleur atout contre le délitement de la communauté nationale et la montée du communautarisme actuels.”
Anne Coffinier, le jeudi 27/10/2011
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