Aujourd’hui, l’école prépare les étudiants à intégrer les grandes Universités Internationales. Cet établissement est plébiscité par les parents car les enseignants y sont très qualifiés et impliqués dans un enseignement de type anglo-saxon. Il a des équipements performants, dans un cadre rigoureux, mais cependant agréable et ouvert.
Les 9 et 10 novembre dernier, j’ai été accueillie à la St Andrews International School de Bangkok pour deux journées d’observation. Mr Roo Stenning, Head of High School, Theory of Knowledge teacher,.m’a permis d’assister, à 2 fois 9 périodes de cours de 35 min, essentiellement en classe première/terminale (year 12 & 13). J’ai pu interroger les enseignants à la fin de certaines périodes (selon les personnalités) et une petite dizaine d’élèves aux récréations et à la pause de midi, ainsi que l’adjoint responsable des 1ères et terminales.
En bref, quelques chiffres : environ 1 000 élèves du primaire à la terminale, 20 % de thaïlandais et beaucoup d’enfants d’expatriés internationaux d’une 30aine de nationalités différentes, une scolarité 12 000 €/ans/enfants (sachant que 10 000 € est le minimum pour une école internationale), un recrutement des enseignants à Londres ou localement, un effectif de classe de 12 à 20 élèves.
Voici quelques points originaux qui ont attiré mon attention du point de vue du cadre de vie, des relations avec les parents et les enseignants, de l’évaluation et des méthodes de travail avec les élèves.
– Le cadre est très soigné et familial, avec des petits bâtiments modernes et fonctionnels, des coins et des recoins pour s’asseoir, travailler, boire un café… Des espaces dédiées par niveau, mais pas « étanches ». Une belle circulation. Situé en centre ville, tout est donc ramassé, il y a au centre un terrain de sport et une piscine extérieure, ce qui donne une sensation agréable et aérée au Campus. Des panneaux d’affichages nombreux et qualitatifs tant sur le fond que la forme (des belles affiches, simples, avec des propositions variées de « challenges », d’activités caritatives, de sorties…). L’uniforme est de rigueur comme dans toute l’Asie. Il n’y a pas de sonnerie pour ne pas stresser les élèves (sauf une cloche à la fin de la récréation), mais de toutes évidences, les enseignants sont très ponctuels, les élèves perdent des points s’ils arrivent en retard, ce sont des petits effectifs, des jeunes de bonne composition, ainsi ils sont à l’heure.
– Les parents sont bienvenus à l’école, ils peuvent y rentrer grâce à leur badge : prendre un café en attendant un enfant, rencontrer un enseignant dans sa classe à la fin des cours… Ils ont aussi accès à quelques activités : conférences, sport… Les parents des élèves du lycée sont moins présents physiquement, étant aussi souvent professionnellement très pris, ils utilisent la communication par mail facilement.
– Les enseignants sont présents toute la journée (7h30 – 15h minimum) et très investis, ils ont une classe dédiée, des fournitures, un salaire très correct (salaire moyen est de 3 500 €). Ils animent au moins un atelier par semaine (sport, théâtre, soutien, … une centaine d’ateliers sont donc proposés). Ils sont choisis pour leur motivation et leur volonté de s’impliquer dans la vie de l’école. Leur contrat est renouvelable tous les ans. Il n’y a pas de conseil de classe. Chaque enseignant est responsable de sa matière et du suivi de ses élèves, il en réfère au responsable de niveau à la fin de chaque trimestre, en mettant en avant les progrès des élèves. Il y a un professeur coordinateur par discipline, par exemple le responsable des profs de math. Tous sont en tenue professionnelle, avec une allure soignée. J’ai été frappée par l’efficacité des enseignants, notamment du fait de la durée des périodes (35 min), il faut être très déterminé et organisé et ils le sont ! De plus, ils sont vraiment centrés sur ce que l’enfant apprend maintenant.
– Le travail des élèves :
- Les élèves de 1ère et terminale sont équipés d’un ordinateur portable en début d’année, ils utilisent l’espace numérique de travail –Drive- avec beaucoup de dextérité. Ces portables ne sont pas utilisés à tous les cours, les élèves s’organisent comme ils le souhaitent. Ils disent qu’ils ne pourraient pas s’en passer, cependant, je n’ai pas observé d’utilisation très pertinente, tout comme pour les TBI : les ordinateurs servent surtout à la prise de notes (souvent en « document partagé »…). Lors des cours plus « magistraux », j’en ai vu quelques uns, les élèves vont aussi sur Facebook, ou sur des sites de e-commerce !
- J’ai observé beaucoup de travaux de groupes (les classes sont disposées à cet effet table en carré de 4), souvent pertinents et bien menés : les consignes très précises quand à l’attendu sont données progressivement (toutes les 5 min environ pour guider le travail). Ces derniers favorisent l’enrôlement des élèves dans la tâche, l’expression orale, l’analyse, la confrontation à l’avis des autres élèves, une production écrite aussi de temps en temps.
- Le secret du niveau des élèves, me semble-t-il, est dans le travail personnel fourni à la maison (facilement 3-4h/jour disent tous les élèves de terminales interrogés, voir plus). Ils récupèrent les polycopiés à la fin du cours, les livres à lire, ils doivent rendre une dissertation tous les 15 jours. Il n’y a donc pas de mystère, le travail personnel y est pour beaucoup. Mais ils s’y engagent volontiers grâce au cadre, à l’ambiance, au soutien des enseignants, au respect des différences (culturelles, religieuses, intellectuelles…), les amitiés les portent aussi. Beaucoup d’ateliers, de sorties, de voyage, de « challenge » sont proposés et favorisent l’esprit d’équipe, d’ouverture et d’entraide.
– L’évaluation
- On peut résumer en disant que tout est évalué et récompensé : la présentation, l’assiduité, le travail en classe, le travail à la maison, l’implication en classe, avoir ou non ses affaires… tous cela donne des points (pour le groupe auquel il appartient) et un niveau (sur le bulletin).
- On ne parle pas de sanction. Le responsable dit qu’il n’y en a pas, et règle en tête à tête les soucis s’il y en avait.
- Les travaux écrits donnent lieu à trois éléments : un niveau (A,B,C…), l’identification des difficultés, et les objectifs à poursuivre. Sur chaque copie, l’enseignant mentionne ces trois éléments.
Cette organisation en « niveau » est en effet très intéressante, car les notions de chaque discipline ont très bien été recensées, listées et ordonnées, cela revient à une douzaine d’étapes environ à franchir sur l’ensemble du collège/lycée. Et selon l’âge que l’on a on est sensé être rendu à tel niveau.
Exemple (théorique) en Français :
level 1 : savoir conjuguer les verbes à l’Indicatif
level 2 : savoir accorder le participe passé
…
level 12 …
Grade A : correspond pour un élève de 2nde au level 8, mais pour un élève de 3ième au level 6 et pour un élève de terminal au level 10
Grade B : correspond pour un élève de 2nde au level 7, mais pour un élève de 3ième au level 5 etc
L’objectif étant que selon leur classe d’âge, ils soient toujours en level A ou B.
Ceci permet de faire des cours en groupe de niveau/level, surtout pour les langues et les mathématiques, les élèves qui avancent plus vite, passent dans le groupe du niveau supérieur.
Les grilles de bases sont extraites de l’ancien modèle éducatif anglo-saxon et ont été légèrement aménagées. Celles-ci sont très simples, concrètes et tiennent sur 2 pages A4.
- Sur Moodle (la plateforme collaborative) tout, vraiment tout est inscrit, les infos du matin, les notes, les supports de cours, l’assiduité, le lien avec les élèves, avec les parents…. (La plupart des enseignants rencontrés, font quand même un tableau Excel basic avec la liste de leurs élèves et leurs notes). En bref, c’est un outil de suivi imparable mais très contraignant pour les enseignants.
– Il y a 6 matières d’enseignement général obligatoire, ce qui simplifie les choses pour les élèves. La contrepartie, c’est qu’une deuxième langue, l’histoire, la physique, la chimie, la psychologie, l’économie, le dessin etc sont des matières optionnelles… enseignées en petit groupe de niveau. Que l’histoire soit facultative m’a beaucoup surprise, mais le contexte international de l’école le justifierait, quelle histoire enseigner ? Celle de la Thaïlande ? Dans la réalité c’est l’histoire occidentale, européenne, anglaise … : pas toujours évident à justifier. Dans tous les cas cela démultiplie les classes, il faut avoir les moyens organisationnels, humains et financiers d’une telle politique.
Les programmes et formations internationaux sont méconnus voire méprisés en France, ce qui est dommage. Certes, ce sont de réelles entreprises avec un service marketing, une politique de communication, des évaluations … tout ceci nous est un peu familier, mais donne une autre dimension à l’établissement, et rejailli de façon dynamique sur de nombreux acteurs plus ou moins proches : c’est un véritable lieu de vie, un repère culturel et social.
Les petits effectifs facilitent la discipline, les échanges, le travail de groupe, l’accompagnement personnalisé, bref rend possible beaucoup de choses…
Cette expérience a été, bien sur, très enrichissante. Ce modèle qui prépare à l’I.B. a été une découverte. J’ai réalisé aussi que l’éducation n’est pas gratuite … et c’est souvent un investissement fort des parents, tant sur le plan financier que moral, et des acteurs de l’école. L’œuvre d’éducation est tellement précieuse. J’en ai senti fortement la valeur, tellement les moyens mis en œuvre dans cet établissement – dans leur diversité- étaient importants. L’école St Andrews est un bel exemple de milieu favorable à une communauté d’enseignant, d’élèves, de parents en vue du travail. Ceci est bien résumé par l’affiche du bureau de M.Roo « Travailler dur et être des gens sympas ! ».
Par Caroline Mentré, Enseignante, en formation Neurosciences et Pédagogie.