Les écoles hors-contrat en danger

EXCLUSIF MAG – Le gouvernement entend durcir les procédures pour ouvrir une école hors contrat et veut imposer à tous le programme scolaire officiel de l’Éducation nationale.

Les écoles hors contrat sont inquiètes. Le 6 avril dernier, sur le plateau de France 2, la ministre de l’Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a annoncé son intention de rendre plus difficile leur ouverture. « Compte tenu des risques de radicalisation, je me demande si n’est pas venu le temps de passer d’un système de simple déclaration […] à un système de contrôle a priori, c’est-à-dire d’autorisation. »

Le secrétaire général de l’Enseignement catholique a été le premier à s’émouvoir de cette déclaration dans une lettre adressée fin avril à François Hollande. Pascal Balmand y exprime sa « plus extrême vigilance » face à ce projet qui met dans le même sac tous les établissements indépendants.

Anne Coffinier, directrice de la Fondation pour l’école, juge cette perspective inacceptable. « Le droit à créer une école préexiste à une quelconque autorisation étatique », explique-t-elle. Sans parler du fait que « passer à un régime d’autorisation alourdira et allongera les procédures de création d’école ». Pis, pour obtenir l’autorisation de l’État, les écoles hors contrat auront tendance à aligner leur projet pédagogique et leur recrutement sur les exigences de celui-ci pour chercher à lui complaire. « Cela réduira le pluralisme pédagogique », s’inquiète Anne Coffinier.

Un déclassement inquiétant

Pour changer le régime juridique du hors-contrat, le gouvernement doit normalement passer par la loi, notamment pour modifier les dispositions législatives du Code de l’éducation. Or, telle n’est pas son intention. Dans le cadre de la loi Égalité et citoyenneté, prochainement à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, le gouvernement compte passer un amendement d’habilitation pour déclasser les dispositions du niveau législatif vers le niveau réglementaire, ce qui lui permettrait de les retoucher plus facilement. « Ce point est inquiétant, prévient Anne Coffinier. Si les pièces à produire pour être autorisé à créer une école ou les motifs de refus d’une école pouvaient être changées par décret, rien ne garantirait le hors-contrat contre des évolutions très défavorables dans ce domaine. »

Cette réforme n’est pas la seule à menacer les écoles hors contrat. Selon Anne Coffinier, le gouvernement s’apprête également à prendre un décret dans les prochains jours pour leur imposer de respecter les programmes scolaires de l’Éducation nationale en fin de chaque cycle d’études.

Dans l’état actuel du droit, ces écoles sont libres de fixer leurs programmes scolaires comme elles l’entendent. Leur seule obligation ? Respecter le socle commun de connaissances fixé par le ministère de l’Éducation nationale en fin de scolarité obligatoire. Cet alignement reviendrait « à nier la liberté des programmes et donc des manuels, fustige Anne Coffinier. La liberté d’enseignement serait littéralement vidée de sa substance. » Les écoles indépendantes qui respecteraient cette nouvelle obligation perdraient largement de leur caractère propre, et donc de leur raison d’être. « Celles qui s’en dispenseraient en tout ou partie s’exposeraient à être fermées et vivraient donc dans un état de précarité peu confortable. »

Des réformes liberticides

Les motifs réels de ces réformes sont difficiles à cerner. Officiellement, le gouvernement cherche à mieux encadrer les établissements hors contrat musulmans afin de prévenir toute radicalisation. Les services du ministère semblent avoir une lecture plus technique, évoquant un simple toilettage du Code de l’éducation. Mais les écoles hors contrat représentent en réalité une épine dans le pied des dirigeants socialistes. Ces derniers sont idéologiquement acquis à l’objectif d’un système éducatif unique, dans l’idéal laïque et obligatoire. Ils cherchent à s’en rapprocher par petites touches. « L’indépendance d’esprit des écoles indépendantes ne peut que représenter un chiffon rouge pour tout gouvernement jacobin, peu respectueux des libertés des familles et de la société civile », commente Anne Coffinier.

La Fondation pour l’école entend bien s’opposer de toutes ses forces à « ces réformes liberticides ». « Nous avons pris contact avec nos avocats administratifs et déférerons tous les actes, s’ils devaient être adoptés malgré notre mobilisation, annonce sa directrice. Si le gouvernement veut éviter une guerre scolaire, il doit enterrer ces deux projets de réforme. »

Antoine Pasquier

Source : http://www.famillechretienne.fr/famille-education/enseignement/les-ecoles-hors-contrat-en-danger-195458