Montessori, Steiner… : le hors-contrat, hors de prix ? Un article de Rue89

Le blog Rue89 bat en brèche les idées reçues sur le hors-contrat et, à partir de l’exemple des écoles Montessori, montre le réel service que ces écoles apportent aux personnes de tous horizons. Finalement, si ces écoles pas comme les autres pouvaient bénéficier d’un mécanisme de financement permettant de neutraliser leurs coûts pour les rendre accessibles à tous, il semblerait bien que ces écoles indépendantes pourraient apporter de signalés services à la société !

“Mille deux cent euros, c’est la somme que déboursait chaque mois Marie-Laure Maignon, 34 ans, pour ses trois enfants scolarisés en maternelle dans un établissement hors-contrat en 2007 et 2008.

“Un coût astronomique, même si l’école en question (Saint-Benoît à Versailles) avait tout pour conquérir cette maman attristée de reprendre le travail :

  • prise en charge des enfants dès 2 ans (qu’ils soient propres ou non),
  • petits effectifs multiculturels,
  • initiation à l’anglais une demi-heure par jour,
  • éveil musical,
  • apprentissage du goût et de la variété culinaire…

« Même le repas faisait partie de la pédagogie : les maîtresses déjeunaient avec les enfants pour leur inculquer le plaisir de goûter de tout et les bonnes manières. »

“Cette responsable ressources humaines a vu son rôle de mère révolutionné par cette pédagogie basée sur Montessori et Pierre Faure. Cependant, le coût prohibitif de cette école a eu raison de ses principes. Un déménagement dans le Nord-Pas-de-Calais et les trois petits se sont retrouvés inscrits… dans le public !

« C’est loin d’être une cage dorée »

“L’école hors-contrat, un havre réservé à quelques privilégiés ? Julien de Saint-Phalle, 23 ans, s’oppose à cette conception cliché : « C’est loin d’être une cage dorée. Mon meilleur ami de classe vivait dans un HLM avec sa mère seule, qui gagnait tout juste le Smic », tempête ce fils de médecin, qui a fait toute sa scolarité dans des écoles Steiner, essentiellement hors-contrat. Étudiant en journalisme, le jeune homme porte un piercing à l’oreille gauche et milite chez Sud :

« J’ai atterri là-bas parce que mon frère avait de graves difficultés d’intégration scolaire. Mes parents ont donc décidé de nous inscrire tous les deux dans cette école à la pédagogie spéciale, pour simplifier l’organisation. »

“Et le coût ? Julien de Saint-Phalle balaie l’argument d’un revers de main :

« En comparant avec mes amis inscrits dans le privé qui prenaient des cours particuliers, j’avais calculé à l’époque que le prix était presque inférieur ! »

“Reste que beaucoup de familles n’ont pas les moyens de débourser 800 ou 1 000 euros par mois pour la scolarité de leurs enfants. « C’est vrai que ça coûte très cher », répond Marie-Laure Maignon, qui était impliquée dans le conseil d’administration de l’école et devait, à ce titre, multiplier les initiatives pour trouver des fonds.

« C’était vraiment le système D : on distribuait des tracts pour attirer de nouvelles familles, on organisait un marché de Noël pour vendre des objets confectionnés de nos mains… Que de démarches fastidieuses ! »

“Cette maman cumulait ces démarches fastidieuses avec sa profession. Elle a trouvé que l’engagement était lourd et pas seulement financièrement :

« Mais j’ai fait ce choix car je voulais le meilleur pour mes enfants. A ce moment-là, je reprenais le travail et j’avais besoin de les savoir dans un cadre adapté, où l’on prenne vraiment soin d’eux, où l’on soit vraiment à leur écoute. »

« Les écoles Montessori pas représentatives »

“Face à l’argument du coût financier, Anne Coffinier, fondatrice du réseau associatif Créer son école, qui soutient les créateurs d’école dans leurs démarches, a son avis :

« Les écoles Montessori à 400 euros par mois ne sont pas du tout représentatives des écoles indépendantes. En général, les parents déboursent 160 euros par mois pour le primaire. Mais leur vrai coût de fonctionnement d’une école est supérieur (200, 250 voire 300 euros), ce qui rend la réception de dons privés indispensables. Nos dons viennent de particuliers, conscients de l’urgence des enjeux éducatifs. Beaucoup de grands-parents par exemple. Pas des millionnaires ! »

“Pourquoi cette mère de 36 ans, trois enfants, diplômée de l’ENA et de Normale Sup, encourage-t-elle tant les parents et les professeurs déçus par le système actuel à lancer des écoles alternatives, qu’elle appelle « libres » ?

« Lorsque j’ai commencé à enseigner, j’ai été confrontée, à l’ineptie des programmes scolaires, qui ne servent ni l’enfant ni le professeur ni le savoir. Je n’avais pas mon mot à dire, j’étais obligée d’appliquer bêtement la ligne de l’Éducation nationale.

“Je me suis rendue compte qu’il y avait, en France, une grave atteinte à la liberté d’enseigner. Et que je ne voulais pas rester dans ce système. » [NDLR du blog de la Liberté scolaire : cette citation n’est pas d’Anne Coffinier.]

“Face aux difficultés que connaissent les créateurs d’écoles pour trouver des sponsors, cette entrepreneuse a créé ensuite une fondation. L’objectif ? Aider les initiateurs d’écoles à bénéficier de déductions fiscales. Toujours est-il que le coût de revient de ces écoles demeure un véritable frein à leur développement.

« Nous avons eu du mal à recruter »

“Ces écoles dites « libres » ont-elles un taux d’échec similaire à celui des créations d’entreprises – qui sont près des deux-tiers à disparaître dans les trois ans ?Anne Coffinier souligne surtout qu’une trentaine d’écoles se sont créées cette année, contre vingt en Angleterre, pourtant soutenues financièrement par l’État. « Il y a un véritable boom des écoles libres en France, qui n’est pas prêt de s’arrêter ! » 

“Certaines écoles continuent pourtant de mettre la clé sous la porte peu de temps après leur création. Dans un petit village de l’Ain, Antoine Schoff, 49 ans, a participé à la création d’une école avec six autres parents :

« Nous avions du mal à recruter les élèves car nous étions à60 kilomètresd’une grande ville, ce qui obligeait les parents à faire de long allers-retours pour déposer leurs enfants en classe. Nous avons eu du mal à recruter et nous tournions donc à quinze enfants par classe (avec trois niveaux par classe), alors qu’il en aurait fallu trente pour pouvoir payer les deux maîtresses.

“Nous avons été en déficit de 20 000 euros pendant deux ans et pourtant, les locaux nous étaient prêtés. En juin, nous avons donc tout arrêté. » A regret ? « Évidemment ! Si l’occasion se représente ailleurs, je le referai sans hésiter ! Je suis convaincu du bienfait sur mes enfants. »

Anne-Clémence Tillette, Rue89, 17/11/2011