Questions/réponses sur l’émergence des comptes d’épargne-éducation


Le compte d’épargne-éducation est un outil en développement qui apparaît pour de nombreux politiques américains comme une solution contre le gaspillage de biens publics et l’échec scolaire. Zoom sur un moyen de financement de l’enseignement méconnu en France.

  1. Qu’est-ce qu’un compte d’épargne-éducation ?
  2. Le compte d’épargne-éducation est un compte bancaire ouvert par l’État pour les parents d’élèves et qui est chargé de couvrir toutes les dépenses de l’étudiant lorsqu’il passe du système public au système privé.

  3. À qui s’adresse-t-il ?
  4. Le C.E.E est tout droit importé des États-Unis. Son historique est retranscrit par la National Education Association (NEA).
    Un programme l’a introduit en 2011 en Arizona au profit des parents d’élèves à besoins spécifiques  (dys, handicapés ou précoces) qui voulaient les scolariser dans le privé, jugeant que le public ne permettait plus leur bonne intégration dans le système éducatif. Les C.E.E ont ensuite été agréé pour les enfants de militaires en activité, les pupilles de l’État et les élèves d’écoles sous-performantes en 2013. Il est aujourd’hui ouvert à tout étudiant capable de justifier son besoin mais le montant auquel il peut s’élever change selon les différences sociales et les âges.

  5. Quelle différence avec les chèques éducation (vouchers)?
  6. Le chèque éducation représente, à l’instar du C.E.E, une somme versée de l’État à un autre acteur. Cependant, le chèque éducation est un versement de l’État à l’établissement de l’élève passant du public au privé. Hors, comme une majorité des établissements privés sont confessionnels, cette mesure d’aide est contestée, jugée comme une subvention de la religion par l’État. En juin 2015, la Cour Suprême du Colorado a interdit les vouchers pour cette raison. Ainsi Clint Bolinck, avocat de profession a imaginé le C.E.E comme un moyen de contourner ce frein juridique.

  7. Comment fonctionne le compte d’épargne-éducation ?
  8. Ces comptes sont débités grâce à une carte de crédit pouvant financer du matériel scolaire, des livres, des cours de soutien en ligne, les transports scolaires ainsi que des traitements médicaux et paramédicaux. Le montant du compte varie selon le revenu des parents. Cette réforme a pour but d’effacer la carte scolaire et d’ainsi favoriser la mixité au sein des élèves.

  9. Le compte d’épargne-éducation ne coûte-t-il pas trop cher à l’État ?
  10. Non car le fait que les parents soient responsabilisés dans la gestion du montant confié permet d’éviter le sentiment de gaspillage de biens publics car les proches de l’étudiant sont considérés comme les mieux placés pour comprendre ses besoins. Le C.E.E respecte le principe de subsidiarité en privilégiant le rôle des parents dans l’éducation de leur enfant par la liberté de choisir son établissement.
    Pour les familles qui vivent avec un montant inférieur à 185 % du seuil de pauvreté, 100 % du coût moyen de l’élève en établissement public est pris en charge, pour les autres élèves, 90 %. Jusqu’à 18 ans, 2000$ par an au maximum est consacré à chaque élève, soit l’équivalent du coût de l’élève dans le système public. De 18 à 30 ans, le taux d’aides s’accroît sensiblement à cause des hauts coûts des universités et aussi en fonction des conditions sociales de l’étudiant. D’autant plus que si une partie des fonds n’a pas été utilisée pendant l’année, les parents peuvent récupérer l’argent pour le réinvestir dans le régime d’épargne de l’établissement pour l’année suivante.
    Pour la majorité des états fédérés américains, l’application de ces aides s’applique pour les plus défavorisés. Seulement 9 millions de dollars sont dépensés dans le compte d’épargne-éducation car la mesure s’applique que dans les zones scolaires comptant 285 000 élèves, ce qui est peu pour un tel programme.

  11. Dans quel cas le C.E.E peut-il être un échec ?
  • Le C.E.E représente des fonds en moins pour financer le secteur public. Or, ceux-ci ont des dépenses immuables (comme le matériel, toute la maintenance et les transports). Réduire le financement d’une part conduira obligatoirement à la baisse de personnel et la hausse de nombre d’élèves par classe.
  • L’attribution des C.E.E est très faiblement contrôlée tout comme la qualité de l’éducation reçue dans ces écoles libres. D’autant plus que ces écoles investissent souvent d’anciens lieux publics désaffectés comme des supermarchés, des immeubles sans autorisation d’occupation.
  • Le C.E.E s’adresse plus aux familles aisées car ils sont accordés dans des zones urbaines. La population rurale est donc négligée et le choix scolaire ne lui est pas permis. Cela ne fait qu’accentuer les déséquilibres financiers.

En somme, le compte d’épargne-éducation est une réussite car il permet à l’élève de s’affranchir du système qui lui est imposé (souvent sans considération pour sa situation familiale, ses revenus) au profit d’un système plus personnalisé et plus efficace. Le C.E.E laisse libres les parents de choisir l’établissement le plus à même d’enseigner à leur enfant. Cependant, la manière dont il est attribué et contrôlé peut créer de fortes inégalités entre les élèves du public et du privé. Il est ainsi important de réfléchir à sa condition d’attribution avant de prodiguer le financement scolaire.

Claire Auban